Mercredi 24 Avril 2024

Recréer le Mali : Un impératif existentiel pour les autorités de la Transition

Le changement de Constitution et de République en chantier, qui vont déboucher sur des réformes politiques et institutionnelles majeures, à terme va hisser le Mali au rang des grands pays démocratiques du continent.

Du fait de la mal gouvernance économique et politique, le Mali, à l’instar d’autres pays africains et même européens, était en passe de devenir un pays atypique abonné aux coups de force militaire comme moyen d’alternance au sommet de l’Etat. En 2012, le président élu, Amadou Toumani Touré, pour son deuxième et dernier mandat, a été contraint à la démission par un groupe de militaires, dirigé par le général Amadou Haya Sanogo, capitaine au moment du renversement du régime. Cette irruption inattendue des militaires sur la scène politique a ouvert la voie à une première transition politique après presque deux fois deux mandats de cinq (5) ans, soit vingt ans de pratique démocratique et une alternance politique réussie, citée en exemple sous nos tropiques (Afrique) en 2002. Le premier Président de la République, Alpha Oumar Konaré, démocratiquement élu en 1992, à l’issue d’une transition démocratique de 10 ans, a passé le témoin à l’ancien Président de la Transition, le général Amadou Toumani Touré. Lequel avait fait valoir son droit à la retraite par anticipation, pour se mettre en règle vis-à-vis de la loi électorale avant de se porter candidat à la succession du président Konaré à la tête du pays en 2002. Celle-ci stipule que tout agent public en uniforme qui désire briguer un mandat électoral doit se défaire de sa tenue pour être candidat. La loi prévoyait la démission et non la retraite par anticipation. Mais, le président Amadou Toumani Touré a opté pour le deuxième scénario, qui a été accepté par la Justice.

Elu président de la République, il entre en fonction le 08 juin 2002. Il est resté au pouvoir jusqu’au 22 mars 2012. Date à laquelle, à l’issue d’une mutinerie des militaires du camp Soundiata de Kati, un groupe de militaires, avec à sa tête Amadou Haya Sanogo, alors capitaine, s’empara du pouvoir. Le Président renversé réussi à s’échapper du Palais de Koulouba pour trouver refuge quelque part dans la zone ACI 2000. Après plusieurs jours de négociation, il accepta de démissionner pour ouvrir la voie à une transition civile constitutionnelle sous la direction du Président de l’Assemblée nationale, alors dirigée par le professeur Dioncounda Traoré. Celui-ci prête serment devant la Cour suprême comme Président de la République par intérim, Chef de l’Etat et garant de la Souveraineté du pays. Mais, c’était sans compter sur la détermination de Kati à rester dans le jeu. Car, c’est sous la contrainte de la Cedeao et les autres organisations internationales (Union africaine, Union européenne et les Nations Unies) que les militaires ont quitté la scène pour laisse la place à une autorité civile pour conduire la Transition. Ce fuit le début d’une longue et tumultueuse traversée de désert pour le professeur et son gouvernement. Les 18 mois qu’a durés cette période n’ont pas été du tout de la sinécure pour le professeur Dioncounda Traoré et ses deux gouvernements. Amadou Haya Sanogo et ses frères d’armes, mis hors circuit, étaient restés dans la gorge de la Transition, comme un morceau d’os de poisson.

Officiellement, le gouvernement tient ses traditionnels Conseils de ministres sous la direction du Président de la République par intérim, mais, les vraies décisions exécutoires se prenaient à Kati, devant Amadou Haya Sanogo. Sinon, il ne fallait pas compter sur sa mise en œuvre. C’est dans cette atmosphère délétère que sont intervenues les élections générales de 2013, notamment la présidentielle de juillet et août et les législatives d’août et septembre de la même année. A l’issue des deux scrutins, un homme et son parti émergent. C’est le candidat du Rassemblement Pour le Mali (RPM) du défunt président Ibrahim Boubacar Keïta. C’est dans la ferveur d’un Mali plus fort et maitre de son destin que le président IBK a été élu avec une majorité confortable lors de scrutin présidentiel et lors les législatives dans le dessin de lui donner une coudée franche dans les prises de décisions.

Au début du mandat, l’homme a commencé à donner de la voix. Conformément à l’esprit de l’Accord préliminaire signé à Ouagadougou dans la capitale du Burkina Faso, entre le gouvernement du Mali et les représentants des groupes armés rebelles du MNLA, qui stipule que les deux belligérants (les forces armées et de sécurité du Mali et les combattants rebelles) observent une période de cessez-le-feu pour permettre la tenue d’élections libres et transparentes dans le pays. Le nouveau Président de la République élu reprend langue avec les rebelles en vue de la conclusion d’un accord définitif. Mais, en entendant, les rebelles sont regroupés et cantonnés dans un endroit convenu entre toutes les parties. Cependant, cette disposition de l’Accord préliminaire n’a jamais été appliquée. La violation de celle-ci, jusqu’à ce jour, est d’autant plus vraie qu’elle empêche toute possibilité de mise en œuvre de quelque accord que ce soit.

Cette volonté des rebelles du MNLA de garder les armes sur eux a été dénoncée par le président élu, IBK. Qui disait en son temps qu’il ne va jamais négocier avec quelqu’un qui garde son arme de combat contre lui. Cette prise de position d’Ibrahim Boubacar Keïta, non comprise et non soutenue par ses propres compatriotes Maliens, a valu l’éphémère guerre d’une matinée, dont les conséquences hantent encore la République. Car, mal préparée et insuffisamment informé de la capacité de réaction des forces étrangères aux côtés des rebelles mis à genoux à l’issue du combat de quelques heures, les forces armées maliennes ont été contraintes d’abonner les positions conquises quelques heures plus tôt aux rebelles devant la puissance de feu des forces d’occupation, dans la peau des amis, obligeant le président IBK à négocier un cessez-le-feu malencontreux et à notre détriment. Ainsi, à la demande de Bamako, un nouveau cycle de discussions est ouvert à Alger, dans la capitale algérienne, entre les autorités maliennes, représentées par le Haut représentant du chef de l’Etat, le regretté ex-Premier ministre Modibo Kéita, et les rebelles du MNLA, sponsorisés par des alliés français, européens et américains. Mais, cette fois-ci les rapports de forces en présence ne sont pas favorables au Mali. Nous troupes ont été faites perdantes par la coalition des forces étrangères à Kidal, sous le drapeau du MNLA.

C’est  sur cette base de prétendue défaite malienne dans l’éphémère guerre de Kidal de mai 2014 que s’ouvrent les discussions. Les négociations, trainées en longueur pendant plusieurs mois à Alger, vont finalement déboucher sur un accord, intitulé : « Accord de paix et de réconciliation issu du processus d’Alger » signé en deux temps à Bamako en mai et juin 2015. Parce que les rebelles du MNLA, qui semblent rouler dans le brancard des intérêts français, européens et américains, refusent le premier texte consensuel proposé par la médiation algérienne et paraphé par la partie malienne, ainsi que les autres mouvements armés. Et, après moult tractations, un nouvel accord, dont le contenu est encore ignoré de la majorité des Maliennes et des Maliens, est signé en juin de la même année à Bamako. Toutefois, il est à noter que la signature de cet Accord de paix n’a rien apporté de valeur ajoutée à la paix au Mali, la belligérance du MNLA et ses alliés : MAA, HCUA et autres connus ou non connus, sous le management des sponsors français, européens et américains, a juste délocalisé son champ de combat du septentrion (Kidal et alentours) vers les régions du Liptako-Gourma, dans la zone des trois frontalières : Mali, Niger et Burkina Fao. Elle a également changé de méthode et de visage. En lieu et place, des mouvements cités ci-dessus, émergent un peu partout dans le Liptako Gourma de nouveaux acteurs sous différents vocables : tantôt djihadistes, tantôt islamistes et/ou extrémistes » et dans différentes organisations criminelles : tantôt EIGS (Etat islamique dans le grand Sahara), tantôt GSIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans). La première organisation est prétendument dirigée par des salafistes venus d’ailleurs, tandis que la deuxième est dirigée par Iyad Ag Ghali. Qui fait d’ailleurs l’objet de beaucoup d’attention de la part de nos confrères de Jeune Afrique. Une communication à outrance qui cache mal les vraies intentions de Paris à vouloir rester dans le jeu, malgré le renvoi de ses troupes du Mali (Barkhane, Takouba, etc.). Toutefois, il convient de noter un point commun à tous ces mouvements. C’est : la guérilla  urbaine comme mode opératoire, avec comme moyen d’expression la terreur sur les populations en milieu rural comme urbain. Les objectifs recherchés par les rebelles du MNLA et leurs sponsors français, européens et américains est d’obtenir la partition du Mali en usant de la méthode d’usure. Il s’agit de terroriser les populations locales les obligeant à abandonner leur lieu de résidence. Les poches de désert humain qui se créent vont leur permettre de faire migrer d’autres populations pour des besoins de recensement et de vote de séparation, exactement comme ce qu’ils ont fait au Soudan, au bout de trois décennies de combat. Et, le régime du président Ibrahim Boubacar Keïta, qui prenait l’eau de partout, ne pouvait plus continuer à subir. Aussi, avaient-ils misé sur un éventuel affaissement du système, qui leur permet de soumettre l’Etat malien affaibli à la dure épreuve de mise en œuvre du contenu caché de l’accord, qui allait finir par couper le pays en deux. Malheureusement pour eux et heureusement pour les Maliennes et les Maliens, ce rendez-vous a été manqué, parce que les militaires qui se battaient sur le terrain ont déposé le président Ibrahim Boubacar Keïta et se sont emparés du pouvoir, à l’issue d’une insurrection populaire qui a duré plusieurs mois.

La suite dans nos prochaines éditions.

M. A. Diakité

Source : Tjikan 3 Fév 2023

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Mon analyse personnelle sur le projet de constitution :

A prime abord, on remarquera que la constitution n’est pas nouvelle car elle ne met pas sur pied une nouvelle république mais elle  se contente de modifier la constitution actuelle en y ajoutant d’autres institutions.

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